CGT, les leçons d’une histoire sociale, Georges Séguy, le choix de l’audace, par Yves René

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Essai Alain Guinot revisite l’apport de l’ancien secrétaire général de la Confédération Georges Séguy au syndicalisme en montrant sa modernité.

En pleine bataille des retraites et alors que vient de s’achever le congrès de la CGT, voilà une belle occasion de marquer une pause et de s’offrir un moment d’histoire. Avec son livre intitulé Georges Séguy, le choix de l’audace, Alain Guinot braque les projecteurs sur le parcours et, surtout, l’apport au syndicalisme de celui qui fut à la tête de la Confédération syndicale pendant une quinzaine d’années, entre 1967 et 1982.

Résistant au nazisme puis déporté dans sa prime jeunesse, secrétaire général de la CGT à 40 ans, et dirigeant du PCF, figure de proue du soulèvement de 1968, Georges Séguy (1927-2016) fut l’homme des novations dans de nombreux domaines.

Démocratie, indépendance et unité

Tirant les enseignements de Mai 68, des mutations du salariat, mais aussi des difficultés de la gauche à s’unir pour offrir une pers­pective de changement, et des impasses de l’expérience des pays dits socialistes, il engage dans les années 1970 une mise à jour de la CGT sur trois sujets fonda­mentaux posés de longue date au mouvement syndical : la démocratie, l’indépendance et l’unité. Une véritable entreprise de modernisation, culminant lors de l’historique 40e congrès de la Confédération (1978, Grenoble), mais qui restera inachevée – dans des conditions sur lesquelles le livre apporte des ­éléments inédits.

Pour autant, pour l’auteur, la pensée et l’action de Georges Séguy n’ont rien perdu de leur modernité. Et de fait, au moment où, en ce début 2023, l’ensemble des syndicats conduisent dans une unité remarquable la lutte contre la réforme des retraites, comment ne pas souligner l’étonnante résonance de la proposition choc lancée par le secréatire général en 1978 : la création d’un « comité national d’unité d’action », lieu permanent d’échanges, de construction de revendications, d’actions communes qui réunirait toutes les centrales syndicales ?

« Source d’expériences et d’enseignements »

Après des années d’affaiblissement, d’impuissance à empêcher les mauvais coups, à s’adapter pour faire face aux nouvelles formes d’exploitation du travail, les syndicats trouveront-ils, dans l’actuel exceptionnel mouvement sur les retraites, les forces pour affronter les défis quasi existentiels qui leur restent posés ?

Si l’histoire ne fournit pas de recettes toutes faites, elle n’en est pas moins – spécialement s’agissant d’une organisation affichant 128 ans d’existence et de combats au compteur – « source d’expériences et d’enseignements qu’il serait coupable d’ignorer au seul motif que le contexte a changé », note dans sa préface Bernard Thibault, ancien secrétaire général de la CGT de 1999 à 2013.

C’est en s’appuyant sur ces enseignements, et avec la conviction qu’il faut « être toujours disponible pour l’innovation, l’ouverture et le débat », qu’Alain Guinot esquisse en conclusion les voies possibles d’un nécessaire « renouveau syndical ».